Note au lectorat


Je vous encourage à laisser vos impressions, réflexions et remarques en commentaire
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Collecter et comparer les visions et les opinions est la meilleure méthode quant à l'émulation vers le progrès. N'hésitez pas, même si (surtout si) vos opinions divergent de l'esthétique ou du discours que je présente. Je ne publie pas pour recevoir des éloges (pas uniquement) mais plutôt pour progresser en confrontant mes écrits au jugement du lecteur.

dimanche 28 septembre 2014

Le Temps des pieuvres (nouvelle)

Le Temps des pieuvres


─ Docteur, ce n'est plus possible !
─ Oui, bien entendu, je note. Ce-n'est-plus-possible. Continuez je vous prie.

           Le docteur Flumblvb étirait ses tentacules dans son dos pour en détendre les chairs. C'était sa cinquième consultation aujourd'hui, et l'on était vendredi. Il avait hâte de prendre le courant BallFwitz et d'aller se détendre dans les eaux du Fjord de luxe Artacoa. Mais pour le moment, il lui fallait continuer d'examiner ces malheureux. Flumblvb avait beaucoup de compassion pour ses clients. Lorsque l'on étudie la psychiatrie, il n'est pas rare de finir par éprouver une grande empathie envers les défaillants, ainsi qu'ils étaient nommés dans les manuels de l'institut. Le terme « malade » était, sans aucun doute, nocif à la santé mentale du patient.

─ Docteur, vous voyez, je ne comprends pas. Nous avons tout fait pour nous entendre pourtant. Mais rien à faire.
─ Vous souffrez de ce conflit ?
─ Et comment ! Docteur, les poulpes sont connus pour leur pacifisme, leur souplesse et leur ouverture d'esprit. Pourtant, suite à ce malheureux malentendu...
─Vous voulez parler de l'incident préambule à la création du NEMO ?
─ Exactement ! Comment pouvions-nous savoir que leurs coutumes étaient si différentes ?
─ C'est le risque de toute rencontre inter-civilisationnelle.
─ Ce fut une catastrophe. La situation a dégénéré, et les ambassadeurs se sont pris le bec avec ces humains.
─ C'est du passé voyons. Ce n'est pas parce que nous commémorons cette terrible tragédie chaque année depuis deux siècles que...
─Docteur ! La guerre a commencé ce jour-là ! Je ne dors plus. Dès que je ferme les yeux, je me l'imagine. Je vois le sous-marin arriver près de la ville tentaculaire. Je m'imagine les envoyés du gouverneur offrir l'étreinte de l'amitié. Et ces humains, se croyant agressés, qui ont répondu par le fer et le sang !

           Le docteur Flumblvb bailla ostensiblement

─ Je vois cet homme, lui et sa maudite fée électricité, la hache à la main, en train de démembrer nos pauvres camarades.
─ Intéressant, intéressant. Vous n'avez jamais vécu cette scène pourtant ?
─ Non docteur. Je suis né mardi dernier.
─ Bien entendu... J'ai l'impression que vous souffrez d'une psychose sociale contemporaine. Vous avez peur du monde dans lequel vous vivez, et vous vous focalisez selon ce qui, selon vous, est responsable de la déplorable situation actuelle.
─ Selon moi ?! Mais enfin, docteur, c'est évidemment cet événement qui a scellé le noir malheur où nous dérivons.
─ Non, ça c'est moi, désolé. Je fais un peu d'incontinence ces derniers temps.

           Flumblvb agita ses tentacules pour diluer l'encre qu'il venait de relâcher et opacifiait l'eau de son bureau.

─ Si je comprends bien, vous considérez que c'est un malentendu qui est la cause de la guerre inter-espèces actuelle ? Rien à voir donc avec la xénophobie humaine latente, les intérêts économiques quant à l'exploitation des grands fonds et l'orgueil grégaire enviant la domination planétaire.
─ Docteur, je suis absolument convaincu que la création de la Nouvelle Entente de Maltraitance des Octopodes a pour fondateur les héritiers spirituels de cet homme.
─ Hum ? Quel homme ?
─ Nemo bon sang ! Le capitaine Nemo, le fléau des pieuvres ! Celui qui a répandu toutes ces calomnies sur le kraken, celui qui a associé le noble peuple des octopodes à ces détestables calmars.
─ Vous ne seriez pas un peu raciste ?
─ Enfin docteur ! Des gars qui ont dix appendices mobiles dont deux hypertrophiés. C'est pas de gens comme nous !

           Flumblvb jeta un œil au cadran marin qui dérivait près de la fenêtre de corail. Dehors, les rayons réfléchis par l'iceberg jusqu'à la septième profondeur indiquaient que la nuit était tombée. Déjà les riverains fluorescents de 845ème allumaient leurs lumignons organiques nimbant les fonds marins de lueurs opalines

─ Je regrette, mais nous allons devoir achever notre séance.
─ Ah ? Très bien docteur.
─ N'oubliez pas votre coquille en partant. Vous savez, je ne comprends pas pourquoi un bigorneau se sent si concerné par les problèmes des pieuvres. Vous prenez la chose bien plus à cœur que la plupart des membres de notre communauté, moi compris.
─ Franchement docteur, avec la vie lymphatique que nous menons, nous autres gastéropodes, il faut bien se trouver une occupation.


2 commentaires:

  1. Réponses
    1. Ravi que vous l'ayez peinte.

      Je suis tombé dessus en faisant défiler des résultats sur Google Image, et celle-ci m'a tapé dans l'œil. J'espère que cela ne vous gêne pas que j'utilise votre peinture pour illustrer mon texte. J'ai inséré un lien de renvoi vers votre blog dans l'image, après avoir un peu tripatouillé le code HTLM.

      Si cela devait poser un problème, je retirerais évidemment votre image de ce blog.

      Supprimer

Soyez polis, mais non moins acerbes si l'envie vous prend. Les fautes d'orthographe sont bien sûr tolérées (moi-même, je ne suis pas à l'abri d'une hérrRoeure). D'ailleurs, faites-moi ─s'il vous plait─ remarquer les coquilles orthographiques, grammaticales et syntaxiques que vous relèveriez.

Vos commentaires m'aideront à progresser. Merci d'avance !

Voici le creuset où tournent d'hétéroclites écrits, allant de la nouvelle au pamphlet, en passant par toute une gamme de formes littéraires (poésies, saynètes, spicilèges, diatribes, réflexions plus ou moins profondes).


Mon appétit est ─pour le moment─ trop immense pour me restreindre sur la question des genres.